Hanoi, la tumultueuse

Hanoi, la tumultueuse

Il y a quelques semaines a eu lieu à Hanoï une conférence internationale sur le trafic d’espèces protégées. Une symbolique forte pour l’un des pays asiatiques des plus consommateurs et trafiquants en matière de biodiversité.

Un événement dont j’ai eu connaissance à travers mon travail et qui dénote une nouvelle fois la dynamique d’évolution dans laquelle est rentré le Vietnam depuis déjà plusieurs années. Entre autres, une conscience environnementale, bien que très timide, est en train d’émerger… Énormément d’efforts restent cependant à fournir. Il suffit de se rendre dans les lieux les plus touristiques (baie d’Halong, etc.) pour constater notamment les dégâts du tourisme de masse (Oh une méduse ! Ah non… c’est un sac plastique). Il suffit de se rendre dans les marchés pour se rendre compte que beaucoup de spécimens ou de produits d’espèces protégées (tortues, oiseaux, etc.) continuent de se vendre comme des petits pains.

Mais aujourd’hui l’objet de mon récit est ailleurs : il y a quelques semaines, l’information de cette conférence d’Hanoï a fait ressurgir de mon cerveau le souvenir d’une atmosphère citadine si singulière qu’il fallait que je vous la conte en quelques lignes.


Le réveil des sens

Dans le bus de nuit qui me ramenait d’Ha Giang, mes yeux se sont ouverts vers 4h du matin aux abords de la ville. Son immensité, son activité incessante et les lumières criardes de sa périphérie sont venues perturber mon sommeil pour m’avertir d’une arrivée imminente.

Dans la gare, les pieds au sol mais la tête toujours dans le brouillard, j’ai plongé dans un bain de foule matinal. Il a fallu, sans transition, mettre tous mes sens en éveil afin de trouver le bon taxi et la bonne auberge où finir ma nuit.

Cet appel aux cinq sens fut une constante durant mes trois jours passés dans cette ville.

Imaginez-vous évoluer sous une chaleur étouffante, dans un chaos sans nom, au milieu de milliers de scooters et autres deux roues. De multiples petites échoppes grignotent les trottoirs, de grandes enseignes commerciales cohabitent avec les bâtisses traditionnelles pour former un véritable patchwork architectural. Imaginez-vous des vietnamiens manger, boire, fumer ou simplement converser sur des petits tabourets rouges et bleus parsemant les trottoirs et, au dessus de votre tête, dessinez des millions de fils électriques entremêlés qui assurent la télécommunication de tout ce petit monde.

Vue depuis mon auberge de jeunesse 🙂
Bienvenue à Hanoï…!
Entre aménagement « moderne » et architecture traditionnelle

Imaginez-vous ensuite les bruits incessants venant de tous bords, de très tôt à très tard dans la nuit : klaxons, moteurs, discussions animées, annonces orales enregistrées en boucle sur un magnétophone old-school accroché au vélo des vendeurs ambulants, annonces matinales interminables de sons saturés voire inaudibles sur les haut-parleurs publics disséminés dans la ville…

Imaginez-vous maintenant la poussière et la pollution omniprésentes qui rentrent en compétition – pour vous apaiser – avec les odeurs de cuisine faites de vapeurs, d’épices, de fritures et de parfums mélangés de viande, poissons et de légumes dans tous les recoins de rues.

Imaginez-vous goûter à ces mets exotiques qui titillent vos narines et rencontrent votre chemin…

Imaginez-vous enfin céder ou résister à la tentation de toucher aux multiples babioles vendues par les innombrables petits commerçants à l’affût du moindre de vos mouvements… !

Vendeuse ambulante de fruits et légumes

Mes premières après-midi et soirée m’ont laissé l’impression d’une éternité tant la vie fourmille dans les rues et les sens s’attardent sur des millions de choses à la fois. La sérénité des montagnes du nord était déjà bien loin… !

Par chance, mon auberge de jeunesse « The Sanctuary » porte bien son nom. Elle m’offre des répits pour rechanger les batteries dès que la fatigue se fait un peu trop sentir.

C’est dans cette auberge que j’ai rencontré Géraldine, baroudeuse invétérée et parisienne d’origine, à l’assaut de la vie avec un grand V et de la spiritualité en Asie du Sud-Est. Géraldine et moi sommes les deux seules occupantes de cette chambre de 6 lits superposés. Dès les premiers mots échangés, le feeling passa naturellement entre nous et tous les matins, nous discuterons des heures durant de nos expériences de voyage, de la vie, du sens qu’on lui donne, etc. etc. Difficile de s’arrêter !

Après chaque papotage rituel du matin, place à la découverte de la ville. Décidée à voir ce qu’Hanoï a dans les tripes, le défi s’est révélé colossal. Et si cela était à refaire, j’ajouterais au moins 2 jours à mon petit passage dans la capitale, car, une fois l’adaptation au rythme fou et la fatigue du premier jour passés, le dynamisme de cette ville vous saisit et vous emporte.

 

Le culte du deux-roues

Durant ma première balade, j’ai plongé directement dans un fleuve de motos. C’est un passage obligé, il faut apprendre à traverser l’autre bout de la rive sans se noyer. Après une petite analyse visuelle de la manière dont s’y prennent les vietnamiens, je me suis élancée ! La technique est simple : marcher très lentement en ligne droite afin de laisser aux motards (arrivant dans tous les sens) le temps d’anticiper leur bifurcation, c’est tout un art !

Pour mieux comprendre à quoi l’on doit s’habituer, voici un petit aperçu ^^ :

Oui, un art, comme pratiquer le deux-roues. Le rapport des vietnamiens à la moto est en effet très fort. Ils y sont greffés, je dirais même, plus encore que les jeunes à leur téléphone portable. Sur le marché, les hommes et les femmes restent sur leur engin pour choisir et payer leurs produits. Les vietnamiens dorment également n’importe où y compris sur le siège de leur moto (ils ont des nuits courtes et des journées de travail très longues…). Femmes, hommes, adolescents, personnes âgées, tous possèdent un deux-roues et aiment à le customiser ! J’ai même vu des femmes enceintes ou encore des familles entières installées sur le siège d’une petite moto… à 3, 4, 5 personnes… ! Les deux-roues servent également à transporter tout et n’importe quoi, même ce que l’on imagine a priori impossible. On y voit parfois des montagnes d’affaires empilées les unes sur les autres à se demander comment ça tient. Parfois, ce sont des animaux (cochons, canards, oies, etc.) qui y sont attachés… vivants ! Bref, vous l’aurez compris, c’est un spectacle plein de surprises… !

 

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À la rencontre des Vietnamiens d’Hanoï

À chaque fois que j’eus l’occasion d’échanger avec des baroudeurs au Vietnam, le même ressenti se dégageait de leur expérience : celui selon lequel les vietnamiens du nord seraient beaucoup moins chaleureux que ceux du centre et du sud du pays. De retour moi-même des montagnes du nord, j’avais commencé à me faire ma propre opinion… qui ne semblait pas vraiment coller avec celle décrite… Mais bien sûr, chaque expérience est différente et il est impossible, dans les deux cas, de faire des généralités. Pour ma part, m’immerger dans Hanoï le temps de trois petits jours n’a fait que conforter mon sentiment : bien qu’en l’apparence froids, les vietnamiens du nord sont des personnes adorables, bienveillantes et de bon cœur pour vous apporter la moindre petite aide, parfois même, avant que vous ne réalisez en avoir besoin…! Et cela m’a été utile dans bien des cas, dégourdie comme je suis :p

Je pourrais par exemple vous parler de cette jeune fille qui, dès mon arrivée dans cette gare routière, a pris tout son temps pour regarder ma destination sur son téléphone, pour me trouver le bon taxi (en refusant les propositions de ceux qu’elle ne jugeait pas bons pour moi) et pour donner mon adresse au taxi choisi. Le temps que je la remercie mille fois, elle avait déjà refermé la porte de mon taxi, contente de m’avoir aidé dans mon périple. Efficacité vietnamienne je vous dis!

Je pourrais aussi vous parler de ces jeunes étudiants qui, à l’affût de l’étranger qui se balade autour du lac Hoan Kiem, sont venus à ma rencontre pour échanger avec moi en anglais. Sur leur petit calepin étaient inscrites des questions simples qu’ils me lisaient tant bien que mal avec une envie d’apprendre à toute épreuve : « Comment t’appelles-tu ? « Aimes-tu Hanoï ? » « Aimes-tu le Vietnam ? » « Où vas-tu ensuite ? ». Contents d’avoir pu échanger ensemble, nous prendrons quelques photos-souvenirs de notre rencontre !

Les jeunes étudiants avec qui j’ai échangé pour leur permettre de pratiquer l’anglais 🙂

Je pourrais enfin vous parler de cette mamie, assise à côté de moi dans le bus qui me conduisait au Musée des minorités ethniques. Ne voyant aucune indication à l’intérieur comme à l’extérieur du bus, je lui ais demandé dans combien d’arrêts je devais descendre pour le Musée. Bien évidemment, la mamie ne parlait pas anglais et, à première vue, elle n’avait pas non plus l’air très commode… ! Il s’avère qu’elle fut la plus belle surprise de ma journée. Ayant compris où je voulais aller mais ne connaissant pas elle-même l’arrêt, elle s’est immédiatement levée malgré son vieille âge et les multiples secousses du bus. D’un premier pas, elle demanda à tous les gens autour d’elle. D’un autre pas, elle attrapa le contrôleur de bus pour lui demander de veiller à ce que je descende au bon endroit après son départ. Après s’être rassise à côté de moi et ne sachant pas comment la remercier,  je lui ferais un grand sourire auquel elle me répondra par un petit sourire timide caché derrière son visage faussement sévère.

Mais ce ne sont que quelques exemples parmi tant d’autres.

Toute cette bienveillance, c’est une chose dont nous, occidentaux, n’avons pas l’habitude… et qui me surprends toujours tant on peine parfois à croire encore en la générosité humaine…

Ce côté solidaire est-il à rapprocher de la culture et de la politique communistes du pays ? Je ne l’avais encore jamais expérimenté lors de mes précédents voyages, mais ce sentiment communautaire est en effet omniprésent, et encore plus flagrant dans une ville telle qu’Hanoï. Ici, les gens vivent dans la rue. Lorsqu’ils sont chez eux, les portes sont grandes ouvertes, on les voit dormir, manger, prier. Ici, la vie privée ne semble pas exister. C’est l’une des choses qui m’a le plus marquée en arrivant au Vietnam du nord et cela fait contraste avec leur véritable ascendant pour le commerce et l’argent. La réussite économique est en effet une obsession pour nombre de vietnamiens qui ont font même vœux dans leurs prières. Pour le voyageur qui est sans cesse encouragé à mettre la main au porte-monnaie en zone « touristique », il faut avouer que cet aspect-là peut être assez fatiguant. Mais c’est une chose commune à beaucoup d’autres pays non-occidentaux. Et voyager c’est aussi s’adapter ! Il y aura ceux qui accepteront de payer un prix « d’étranger » et il y a ceux qui ne souhaiteront pas être assimilés à de gros billets de dollars sur pattes. Ces derniers apprendront à la vitesse grand V l’art de la négociation, pratique inscrite dans les mœurs au Vietnam. C’est ce que j’ai fait 🙂

Une vendeuse d’ananas rencontrée dans la rue : « Photo ? Photo? » « Ok 🙂 » « Buy me an ananas please ! » Pas folle la p’tite dame :p

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